Les violences sexuelles, un crime invisibilisé dans la crise du M23 (Blog)

La Journée internationale des droits des femmes ne peut être une simple célébration symbolique alors que des milliers de femmes continuent de souffrir dans l’indifférence. La guerre qui ravage le Nord et le Sud-Kivu depuis la résurgence du M23 ne se limite pas aux combats armés. Dans l’ombre des affrontements, un autre fléau ronge la société: les violences sexuelles contre les femmes. Arme brutale et déshumanisante, le viol est devenu une tragédie quotidienne pour des milliers de Congolaises. Pourtant, ces crimes restent largement ignorés dans les négociations politiques et les projets de paix.

En cette Journée internationale des droits des femmes, nous devons nous rappeler que la justice transitionnelle ne peut être reléguée au second plan. La réconciliation ne pourra être aisée sans une prise en compte de ces violences, sans réparation et sans la promesse d’une justice qui répare les injustices passées. La célébration de cette journée ne doit pas se limiter à de simples discours symboliques car cette guerre n’est pas seulement une bataille sur le terrain, mais aussi une tragédie silencieuse vécue par des milliers de femmes victimes de violences sexuelles liés au conflit.

À chaque nouvelle offensive, les témoignages des femmes victimes de violences sexuelles se multiplient. Dans les camps de déplacés, comme ceux de Kanyaruchinya, Bulengo et autres, des milliers de survivantes attendent justice et assistance. Certaines ont été violées sous les yeux de leurs proches, d’autres ont vu leurs maisons incendiées et leurs familles décimées. Ces violences ne sont pas des actes isolés, mais des stratégies délibérées visant à terroriser les communautés et à les soumettre.

L’impunité reste totale. Peu de bourreaux sont traduits en justice, et les victimes, souvent stigmatisées par leur propre communauté, sont contraintes au silence. Pourtant, l’ampleur du phénomène est effrayante : selon les organisations humanitaires, plus de 10 000 cas de violences sexuelles ont été signalés au Nord-Kivu en 2024, un chiffre bien en deçà de la réalité dès lors que la terreur empêche encore de nombreuses femmes de témoigner.

Il est essentiel de rappeler aux protagonistes du conflit que la justice transitionnelle les attend. Les activistes et organisations de justice transitionnelle documentent méticuleusement tous ces incidents. Que les auteurs soient des éléments du M23 ou des membres de l’armée régulière censée protéger la population, la justice, « la vraie justice », est souvent impartiale et intransigeante. Aucun criminel ne doit échapper aux poursuites et aux sanctions, et les victimes doivent être soutenues de manière immédiate et efficace. Le moment venu, aucune atrocité ne sera oubliée, et les responsables devront rendre des comptes. Ne l’oublions pas.

Pendant que les débats politiques se poursuivent, les victimes attendent désespérément une aide concrète. La prise en charge médicale et psychologique des survivantes est une urgence humanitaire absolue. De nombreuses structures de soins, comme l’hôpital de Panzi du Dr Mukwege, l’hopital Heal Africa de Goma, le CH FEPSI de Butembo sont débordées et manquent de moyens face à l’ampleur du désastre.

Jérémie KYASWEKERA

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