Poser le pied en Europe pour la première fois, c’est une sensation toute particulière. C’est un mélange d’excitation et de curiosité qui pousse à explorer chaque recoin. Cet article retrace l’expérience d’un journaliste Congolais membre d’une délégation venue de Butembo, en RDC, pour participer à une mission humanitaire à Bilbao, en Espagne. Animé par un engagement profond pour les questions des droits femmes, il a traversé des frontières et des fuseaux horaires, pour porter haut la voix des Congolaises. Pour lui, ce voyage n’était pas qu’un simple déplacement. C’était une traversée entre deux mondes, avec au centre, une cause : la dignité et les droits des femmes congolaises.
Dans ce carnet de voyage, Jérémie Kyaswekera, journaliste congolais spécialisé dans la couverture des questions des droits des femmes, nous plonge dans l’expérience de son premier voyage en Europe.
Il est exactement 12h14, dimanche 20 novembre 2024, lorsque notre vol atterri à l’aéroport de Bilbao (une ville situé au nord de l’Espagne). A notre descente de l’avion, c’est un vent sec, mordant et glacial qui nous accueille en premier. Rien à voir avec le soleil de midi éclatant de Butembo, notre ville, où à ces heures-là, le soleil est souvent droit dans le ciel et chaud comme un feu de brousse. Ici, il faisait un froid sec, celui qui traverse les vêtements pour s’installer dans les os.
Mais nous savions déjà que ce climat rude allait nous accompagner tout au long de notre séjour car c’était l’hiver. « Toutefois, ce froid n’a aucunement affecté notre détermination face à l’ampleur de la mission qui nous a amené ici. Nous n’étions pas venus chercher le confort, en effet. Nous étions venus porter la voix de celles que l’on entend trop peu, bâtir des ponts, tisser des solidarités. »
Les valises n’étaient pas seulement chargées de vêtements, mais d’histoires de douleurs, d’espoir, et de récits de lutte pour la santé et les droits des femmes. Des sujets que je couvre depuis plusieurs années comme journaliste au CFJ (Collectif des femmes Journalistes).
Mais avant d’atterrir à Bilbao, nous avons fait un long voyage : près de vingt-deux heures de vol, réparties sur plusieurs jours et marquées par beaucoup d’escales. Un long périple, semé de scènes inattendues, de découvertes fascinantes, de rires partagés et de petits spectacles du quotidien, qu’aucun œil curieux ne saurait ignorer. Avant d’atterrir pour de bon, laissez-moi vous partager quelques-uns de ces instants forts, à la fois inspirants et spectaculaires, qui ont marqué cette traversée.
Butembo-Beni : l’art de voyager serré, made in Kivu.
L’itinéraire était bien long : Butembo-Beni-Goma-Ethiopie-Rome-Madrid-Bilbao. À chaque étape, l’écart entre les environnements s’est intensifié. Chaque escale, chaque vol, chaque moment dans les airs apportait de nouvelles scènes, de découvertes riches et d’images qui restent aujourd’hui gravées dans la mémoire.
(Lire aussi : une délégation congolaise en mission humanitaire au pays basque)
Tout commence un matin calme à Butembo. Pas un matin comme les autres. Celui-là portait un goût d’attente, d’un départ longtemps rêvé, le cœur battant un peu plus vite que d’habitude. Dans ma chambre, la valise était prête depuis près d’une semaine, bien calée dans un coin. Le taxi-moto me récupère au petit matin. Il fait encore frais, la ville s’éveille lentement, les coqs chantent dans les parcelles, les boulangeries ouvrent à peine. Je prends un dernier regard sur les collines que je connais par cœur, les rues poussiéreuses de Butembo, les vendeurs ambulants, les enfants en uniforme, … Direction le parking du centre-ville, là où je dois rejoindre les autres membres de la délégation.
Un taxi collectif nous amène de Butembo à Beni où nous devons recuperer un autre membre de l’équipe. Dès les premiers kilomètres, le bitume laisse place à des nids-de-poules, un sol à terre battue rongé par des pluies et le passage incessant des camions. « La poussière s’infiltre partout dans la voiture couvrant les sièges, les bagages et même nos visages… » On avance au rythme des secousses, les reins mis à l’epreuve, le regard perdus entre les collines et les villages que l’on traverse.
Environs deux heures pour parcourir les 54kilometres entre Butembo et Beni, mais on avait l’impression d’avoir couru un marathon en taxi: secoués, abbatus, mais toujours débouts et motivés car ce n’était que la première étape du voyage. Le lendemain nous nous rendons à l’aeroport de Mavivi où notre premier vol nous attends.
Quand enfin nous décollons, la vue sur les montagnes du Nord-Kivu est saisissante. Tout semble paisible vu d’en haut.« Mais je sais ce que cette terre porte des douleurs, des cris étouffés, des femmes qui accouchent seules, des écoles sans bancs, des villages sans routes. Je les ai vues, documentées, entendues. »
L’atterrissage à Goma se fait en douceur. Une ville au bord d’un lac, vivante, nerveuse, parfois imprévisible entre volcan et guerre. « Mais cette fois, je ne suis pas là pour un reportage. Je suis en transit.»
Une escale vers un ailleurs que je ne connais pas encore. Le soir, nous nous retrouvons en équipe autour d’un plat de foufou, sombé et du tilapia, dans un restaurant modeste. Nous n’avons pu imaginer combien ce repas allait nous manquer en Europe. On parle peu. Chacun semble déjà projeté vers ce qui vient.
Un vol pimenté de poulet, de secousses et de prières.
Le lendemain, notre vol à destination d’Addis-Abeba semblait être une simple étape de plus… mais ce n’était pas un vol ordinaire. Ce qui s’est passé entre Goma et l’Éthiopie a transformé ce trajet en un spectacle dont les images tournent encore en boucle dans mon esprit.

Tout semblait se dérouler normalement. À bord du vol d’Ethiopian Airlines, les hôtesses aux sourires disciplinés s’avançaient dans l’allée pour distribuer les repas aux passagers en répétant leur célèbre refrain : « Chicken or fish ? » (Poulet ou poisson ?). Ce sont, en fait, les deux menus de repas qui sont souvent proposés aux passagers : généralement un plat à base de viande blanche (souvent du poulet) et un autre à base de poisson. On venait à peine d’être servis. Un plateau fumant, un café ou un thé bien chaud, un petit verre de vin ou de bière pour les plus détendus… et soudain, le ciel a changé de ton.
Des turbulences violentes et imprévisibles, se sont invitées sans prévenir. Les plateaux ont commencé à trembler, les verres de vin ont vacillé, certains passager pris de panique.
Ce ne furent pas de simples secousses. « L’avion a commencé à trembler comme un vieux bus qui roule sur une route garni des bourbiers. Puis, brusquement, l’avion commençait à plonger, comme en chute libre donnant l’impression de tomber dans le vide.» Des cris ont surgis de partout, des prières à divers langues, à voix haute et à mi-voix. Chacun vivait cet instant à sa manière, entre peur maîtrisée et panique ouverte.
À côté de moi, quelques habitués des vols restaient imperturbables et affichaient un calme presque surnaturel. L’un d’eux a posé la main sur l’épaule de sa voisine en lui murmurant : « Reste calme, c’est normal, ça va passer…». Des mots simples mais qui avaient quelque chose d’apaisant.
Moi, j’ai failli me lever, par réflexe, sans même savoir où je me rends… Mais où aurais-je pu fuir ? Ma ceinture m’attachait solidement au siège, comme pour me rappeler que parfois, il faut juste rester là, s’accrocher, et attendre que ça passe.
Quand l’avion a enfin atterri après de longues minutes de turbulence, un éclat de rire et des applaudissements collectifs ont animé les passagers. Une fois sur le tarmac un groupe d’artistes, visiblement de retour d’un tournoi de concerts au Congo, se sont mis à plaisanter à haute voix : L’un, à moitié mort de rire, imitait les cris de panique de leur camarade :« Mes deux femmes et mes enfants… Seigneur, à qui je vais les laisser si je ne descends pas vivant?! » Et un autre d’enchaîner avec un ton d’humour : « Hé, toi là, t’as même prié en quatre langues! Même en lingala t’as inventé des mots!» Celui au bonnet rouge renchérit en éclatant de rire: « Moi, j’ai confessé tous mes péchés… et même ceux que j’ai pas encore faits!»
Ces blagues venaient clôturer le spectacle, et dans cette atmosphère relâchée, on riait tous comme si l’on venait de survivre à un rodéo. « C’était ma toute première fois face à des turbulences aussi imprévues, et je venais d’en apprendre la leçon la plus précieuse : dans les airs, on ne contrôle rien.»

© Photo : Jérémie Kyaswekera
Une transition spectaculaire.
La transition entre l’Afrique et l’Europe a été aussi spectaculaire qu’enrichissante. De l’Afrique de l’Est, encore marquée par les séquelles des conflits et les défis du quotidien, j’ai progressivement posé les pieds dans des capitales européennes où le confort et l’architecture historique m’ont ébloui.
Le dimanche 24 novembre 2024 à 6heures, nous atterrissons à Rome. Mais ici l’escale a été si rapide que nous ne sommes même pas descendus de l’avion. Curieux et un peu engourdi par les heures de vol, je me suis levée de mon siège, étirée comme je pouvais dans l’allée étroite, et j’ai avancé jusqu’à la porte au moment où les passagers débarquant sortaient. « Là, juste à l’entrée, j’ai fermé les yeux une seconde et respiré une bouffée d’air matinal, un air différent, un peu dense, légèrement épicé, comme si j’absorbais de l’air « sainte » du Vatican ».
Ce n’était pas une visite de Rome, mais c’était assez pour me dire : oui, j’y suis passée. Un mini instant romain, volé entre deux vols. Puis la porte s’est refermée, comme si rien n’avait eu lieu… mais moi, j’avais respiré l’Italie.

À Madrid (capital de l’Espagne), c’est un tout autre décor qui nous a cueillis. Après l’atterrissage, pas question de se reposer : il nous a fallu marcher, marcher encore, et marcher toujours. Pendant près d’une heure, nous avons parcouru l’aéroport Madrid Adolfo Suárez, vaste comme une petite ville, nous perdant de terminal en terminal à maintes reprises, comme dans un film.
Des couloirs interminables sous des plafonds de verre et d’acier, des panneaux lumineux clignotaient de partout, et presque tout était écrit en espagnol. Même les rares annonces qu’on entendait étaient aussi en espagnol. Pas facile de s’y retrouver quand chaque mot vous échappe.
J’avais pourtant appris l’espagnol à l’université… mais là, au cœur de l’Espagne, dans l’effervescence de l’aéroport de Madrid, c’était une toute autre histoire ! Les mots sortaient à une vitesse folle, portés par l’accent des Madrilènes. Les échanges entre les passagers ressemblaient à des cris d’oiseaux : rapides, légers, insaisissables. De mon côté, j’attendais, l’oreille tendue, espérant capter quelques mots-clés familiers pour me repérer… mais le rouleau de paroles filait autour de moi comme un vent capricieux.
C’est finalement l’anglais, ce fidèle allié des voyageurs perdus, qui m’a sauvé. À force d’errer, j’ai fini par m’approcher d’un agent en uniforme bleu. Un peu essoufflé, je lui demande: « Excuse me, Terminal Four? Where can we find it? » (Excusez-moi? Où peut-on trouver le Terminal 4 ?) Il me sourit, compréhensif, et répond avec un accent espagnol chantant : « Ah, terminal cuatro… You have to take the airport bus, señor. It’s far. very far. not walking.» (Ah, le terminal 4… Vous devriez prendre le bus de l’aéroport, monsieur. C’est loin. très loin. On n’y va pas à pied.)
Un bus! Voilà ce qu’il nous fallait, et pas nos jambes déjà fatiguées par les couloirs sans fin. Encore fallait-il trouver l’arrêt du fameux bus… Mais au moins, on avançait, et on savait désormais que le Terminal 4 n’était pas une mer à boire.
(Lire aussi : De Butembo à Johannesburg, un périple journalistique aux délices mémorables)

En marchant dans les interminables couloirs de l’aéroport de Madrid, un brin d’espoir un peu naïf me traversait l’esprit. Et si, je croisais une star du football ? Peut-être Cristiano Ronaldo, élégant et pressé, ou Kylian Mbappé, sourire discret sous une casquette… J’imaginais déjà la scène : un salut, une photo volée, et un souvenir de voyage gravé à jamais. Mais au lieu de ça, c’est un flot de passagers essoufflés, valises glissantes et sacs à dos, que j’ai trouvé. Pas de légende du ballon rond à l’horizon, juste nous, perdus dans ce labyrinthe d’escales.
Enfin, l’ultime étape de ce périple qui est Bilbao, m’a offert un contraste frappant. La modernité de la ville, son atmosphère tranquille, et la beauté du Pays basque m’ont apporté un sentiment de complétude. Passer d’un environnement où chaque jour est un défi à un endroit où la vie semble plus fluide, plus structurée, m’a donné une perspective nouvelle sur le monde, tout en renforçant mon engagement pour la couverture des droits des femmes et la solidarité internationale.
Ce trajet, entre Butembo et Bilbao, a été une véritable traversée, à la fois géographique et émotionnelle, entre des réalités de survie et d’espoir, qui m’a permis de grandir et de redoubler d’efforts pour les causes que je défends.
Silence, on roule !
Dès notre arrivée à Bilbao, une atmosphère froide me saisit. À la sortie de l’aéroport, une surprise nous attend : les taxis et les passagers sont alignés en file. Ils avancent calmement, un par un, dans un rythme silencieux et ordonné. Aucun cri, aucun moteur rugissant, aucun klaxon pour attirer les clients, aucune bousculade. Juste une rigueur presque élégante dans la gestion des passagers. « À cet instant précis, je pensais aux parking de chez nous où chaque départ de voyage commence souvent par des accrochages musclées entre les chauffeurs surexcités qui se disputent les clients…» Ici, à Bilbao, tout semble glisser avec calme et patience, même l’attente d’un simple taxi.
Puis le taxi nous amène à notre hôtel, dans un quartier près du stade de SUN MAMES. Sur le chemin, le paysage était un véritable régal pour les yeux. A bord d’une voiture TESLA qui glissait silencieusement comme sur du velours. La route était fluide, un macadam impeccable, un vent propre et sans poussière…
« Ce genre de paysage qu’on ne connaît pas à Butembo, Beni, Goma ou à Kinshasa, où les klaxons, les motos, les cris de vendeurs ambulants et la poussière se partagent la route dans un certain chaos organisé.» À travers la vitre, je découvrais une ville dont chaque recoin forçait l’admiration.
La circulation routière est ordonnée et tranquille. Et pourtant, aucun policier de roulage n’est visible le long de la route. Les feux de signalisations sont presque partout. « Les voitures comme les piétons s’arrêtent sagement aux feux rouges présents presqu’à chaque kilomètre comme des balises de confiance, et reprennent leur course sans précipitation dès qu’ils passent au vert.»
Une fois les valises déposées, impossible de rester enfermé. Alors que mes collègues prenaient un repos après ce long voyage, mes pieds me poussent dehors, vers les ruelles du Quartier. J’avance au hasard, sans but précis, animée par la curiosité. Les rues sont calmes, le sol est net, pavé avec soin, sans papiers ni détritus. Les trottoirs bien dessinés guident les pas, bordés d’arbres taillés avec précision. Pas de poussière, pas de flaques d’eau stagnante.
À chaque coin de rue, une impression d’ordre et d’harmonie. Même les passants marchent sans se bousculer, certains à vélo, d’autres avec leur chien, le visage détendu, comme si la ville elle-même veillait à leur paix intérieure. Mais très vite une fine pluie m’oblige de faire demi-tour. « Ce soir-là, Bilbao m’a offert une première leçon sans mots : ici, l’espace public est respecté comme un bien précieux…»
Mais ce qui m’a surtout marqué, c’est l’accueil chaleureux et bienveillant que j’ai reçu dès mon arrivée. Andréa, Miguel, Patricia, Fernando et Begoña, nos collaborateurs à Farmamundi, se sont révélés être des hôtes extraordinaires. Chacun d’eux, avec leur sourire contagieux et leur bienveillance infinie, a su rendre ce séjour aussi agréable qu’enrichissant. Andréa, avec sa gentillesse et son enthousiasme, nous a guidés dans nos premiers pas à Bilbao. Miguel, protecteur et attentif, a su nous orienter dans les méandres de la ville avec une patience infinie. Patricia, toujours souriante, a ajouté une touche d’amitié à nos journées les plus intenses, tandis que Fernando, d’une grande sagesse, a apporté des perspectives précieuses lors de nos échanges avec les acteurs locaux. Begonã, bien qu’en congé de maternité, nous a rejointe à plusieurs reprises avec son bébé qui apportant une touche de tendresse qui illimunait nos journées les plus chargées.
Ensemble, ils ont été les piliers de cette mission, nous offrant soutien et réconfort à chaque étape.
Petits plats, grandes émotions.
Loin d’être des touristes, le lendemain, nous nous sommes plongées au cœur de notre mission. Les rencontres avec nos partenaires locaux se sont enchaînées toute la semaine, guidées avec bienveillance et efficacité par nos quatre hôtes. Un programme dense, où chaque jour apportait un lot d’échanges précieux. Chaque rencontre, unique en son genre, nous a permis de faire entendre la voix des femmes congolaises, et chacune se concluait avec une étincelle d’espoir.
« Ce qui m’a profondément touchée, au-delà de l’accueil institutionnel, c’est la sensibilité et la solidarité sincère du peuple basque espagnol. Une chaleur humaine rare, palpable dans les regards, les paroles et les gestes ».

© photo: Andrea Arana / Farmamundi
Le soir, malgré la fatigue accumulée, nous profitions de ces instants pour nous balader en ville, en explorant les rues vivantes et les saveurs locales de Bilbao. Très vite, nous arrivons dans le Casco Viejo, (la vieille ville, l’un des grands centres de Bibao). Les pavés résonnent sous nos pas, les façades colorées des immeubles semblent nous raconter une histoire à chaque coin. On s’arrête, on lève les yeux, on sourit devant un balcon débordant d’ambiance. À la Plaza Nueva, (l’un des espaces le plus populaire de Bilbaoau où l’on s’attable pour grignoter des pintxos, siroter un verre ou simplement profiter de l’ambiance détendue du soir), il y a une douceur de fin de journée.
On s’installe quelques minutes, et on goûte à tout, un peu à l’aveuglette : un plateau de pintxos, du jambon sec posé sur une mousse étrange, des petits pains garnis de poissons inconnus, des sauces, délicieuses mais dont on ne saurait dire le nom. « Tout était nouveau pour nous, curieux mais prudents. Le seul goût familier dans tout, c’était de morceaux de poulet grillé qu’on se partage gracieusement et, à la fin, quelques cuillerées de riz au lait, qui nous rappelle les douceurs simples de chez nous. » Le reste, c’est une nouveauté culinaire à part entière.
Puis on remonte la rue jusqu’au marché de la Ribera, encore ouvert. Là, c’est un jubilé de couleurs et d’odeurs. « Le poisson frais, les fruits brillants, les épices qui nous rappellent les marchés de chez nous, mais version Espagnole.» Et comme si la ville voulait nous surprendre une dernière fois, on marche jusqu’au musée Guggenheim, immense, tout en courbes et en reflets métalliques.
On reste là un moment, silencieux, à contempler cette œuvre d’architecture comme une sculpture vivante. L’art, ici, semble respirer avec la ville. Et nous, au milieu de tout ça, étranger mais curieusement à notre place, on se sent portées entre mission et émerveillement.
(Lire aussi : Le musée Guggenheim, l’emblème de Bilbao) : De Butembo à l’Espagne : souvenirs d’un voyage spectaculaire entre secousses, prières et espoirs, vus par un journaliste congolais.
Un retour nostalgique
Le dernier jour arrive, teinté d’une douce mélancolie. Bilbao m’a ouvert ses portes, ses histoires, ses luttes. L’échange autour des droits des femmes, la découverte d’un soutien humanitaire concret, et l’énergie de ceux qui, comme nous, se battent chaque jour pour plus d’égalité et pour un monde plus juste m’ont profondément marqué.
J’ai aussi découvert quelques mets typiques de la région. Les pintxos, ces petites bouchées savoureuses, du jus de raisin localement connu sous le nom de « moston » sont devenus un véritable délice. J’ai également goûté le calimocho, cette boisson à base de vin rouge et de cola, si typique de la région. Chaque bouchée et chaque gorgée étaient une explosion de saveurs et un moyen de comprendre encore mieux la culture basque.
Bilbao, je reviendrai. Parce que cette première étape en Europe, loin d’être une fin, est le début d’un chemin encore long à parcourir. Un chemin semé d’espoir, de résilience, et de l’engagement nécessaire pour transformer les défis en opportunités.
Et pour cela, je n’oublierai jamais l’accueil incroyable de personnes comme Andréa, Miguel, Patricia, Fernando et Begoña. Grâce à eux, cette mission a été bien plus qu’un simple voyage. C’était un moment de partage, de solidarité et de véritable humanité.
Jérémie Kyaswekera